mardi 29 septembre 2009

Un trophée sur un denier de Septime Sévère (Emèse, 194)

Les trophées sont avec la Victoire, un thème militaire récurrent sur les monnaies romaines. Les Gaulois avaient déjà l'habitude d'élever des trophées avec les dépouilles des vaincus, en particulier ils clouaient la tête de leurs ennemis dans leur habitation. Quant aux Romains sur le champ de bataille, ils accrochaient aux arbres les armes des vaincus. La représentation monétaire classique du trophée est le trophée anthropomorphe où il prend l'allure d'un guerrier: une cuirasse autour d'un tronc d'arbre représente le corps, un casque orne le sommet pour la tête, enfin armes et boucliers sont accrochés au niveau de deux branches horizontales et formant les bras. Parfois des armes, voire des captifs se trouvent au pied du trophée.


n°S42

Dénomination: Denier

Empereur: Septime Sévère

Avers: IMP CAE L SEP SEV PERT AVG COS II - Tête laurée à droite.

Revers: INVIC-T-O IMP - Trophée au pied duquel sont: à gauche un casque et une enseigne (?) ou un javelot; et à droite deux boucliers et deux javelots.

Atelier (année de frappe): Emèse (194)

Références: RSC 232 (30£) - RIC 389 (S) - BMC W365-6 - BnF 6343-7

Caractéristiques: Argent, 3.25g, 17.5mm, 6h. - Ex. FAC

Note: il existe de nombreuses variantes de ce type oriental: variantes de légendes d'avers et légendes fautées de revers. Un autre type avec trophée nomme explicitement au revers ce symbole militaire victorieux : INVICTO IMP TROPAEA.
Commentaire:
Ce denier qui est daté du deuxième consulat de Septime Sévère (194), mais qui a peut-être aussi été frappé l'année suivante, commémore les victoires de l'empereur sur son rival Pescennius Niger. Contrairement aux trophées sur les monnaies plus tardives et rappelant les victoires Parthiques, il n'y a pas de captifs aux pieds du trophée, mais des armes romaines. Le casque au pied du trophée présente un protège-nuque, ainsi qu'un panache. Selon Yann le Bohec, "cet élément de la guerre psychologique visait à faire paraître plus grands les hommes s'avançant dans la plaine." Du même côté que le casque, un objet est planté au sol, il semble qu'il s'agisse d'une enseigne de manipule. Sur d'autres exemplaires, on voit clairement qu'il s'agit d'une lance. A droite et sur le trophée, les boucliers sont ovales et il s'agit effectivement du modèle le plus répandu à cette époque dans les légions. Les armes offensives étaient principalement le gladius (épée courte) remplacée progressivement par l'épée longue et le pilum (javelot).

Détail d'un trophée sur le sarcophage de Portonaccio daté des environs de 190 (Museo Nazionale Romano, Palazzo Massimo - Rome)

samedi 19 septembre 2009

Un type dédié traditionnellement aux impératrices: Pudicitia (Rome, 205)

Pudicitia, la Pudicité ou Pudeur, est un type qui apparait sous Hadrien et qui sera repris régulièrement au cours des IIè et IIIè siècles. Elle est souvent associée aux impératrices qui revendiquent, en bonne matrone romaine, cette qualité morale.


n°J13

Dénomination: Denier

Impératrice: Julia Domna

Avers: IVLIA - AVGVSTA - Buste drapé à droite.

Revers: PVDI-CITIA - La Pudeur voilée assise à gauche, regardant à gauche, portant la main droite à son sein et posant la main gauche sur son siège.

Atelier (année de frappe): Rome (205)

Références: RSC 168 (25£) - RIC 576 (C) - BMC SC72note - Hill 701 (R2)

Caractéristiques: Argent, 17mm, 2.75g, 1h. - Ex. iNumis VSO 2 n°168

Note: Il existe plusieurs types de Pudicitia pour Julia Domna, à Rome et Laodicée, sous Septime Sévère et sous Caracalla. Les attitudes de la personnification peuvent aussi changer, en particulier le visage qui peut être de face ou à gauche et la position des mains: sur le visage, la poitrine ou l'accoudoir.

Commentaire:

Pudicitia apparait très souvent voilée afin de cacher ses appâts féminins. Elle représente la chasteté, la modestie et la loyauté à l'époux. Même si elle est souvent réservée aux monnayage des personnages féminins de la famille impériale, la Pudeur est une qualité qui concerne aussi les hommes. De plus, elle n'est pas seulement une idée abstraite, ainsi l'apparence physique donne des indications sur la moralité de la personne. De même, la façon dont elle se comporte en public révèle ses qualités morales. Des statues montrent l'allure de la personnification et donnent aux femmes un exemple à suivre.


Statue de Pudicitia (Musée Chiaramonti - Vatican)

lundi 14 septembre 2009

Un même type sur un denier et un antoninien: Sol au fouet (Rome, 217)

Dans sa monographie consacrée au monnayage de la famille de Septime Sévère à l'atelier de Rome, P. V. Hill applique la théorie des cycles développée par R. A. G. Carson dans le volume VI du catalogue du British Museum. Un même type est frappé par officine pour tous les métaux confondus dans un ordre bien déterminé. Par exemple, on frappait d'abord l'or avec le type 1 dans l'officine 1, le type 2 dans l'officine 2, etc. puis les deniers d'argent avec le type 1 dans l'officine 1 et ainsi de suite.
Les deux monnaies présentées ici montrent le même type de revers daté de la XXè puissance tribunicienne (217) avec Sol debout tenant un fouet. Elles ont été frappées lors de la dixième et avant-dernière émission de Caracalla.


n°C48


n°C23

Dénomination: C48: Denier ; C23: Antoninien

Empereur: Caracalla

Avers: ANTONINVS PIVS AVG GERM - Tête laurée à droite pour C48 et buste radié à droite, drapé et cuirassé, vu de l'arrière pour C23.

Revers: P M TR P XX COS IIII P P - Sol, radié, debout à moitié à gauche, levant la main droite et tenant un fouet dans la main gauche.
Atelier (année de frappe): Rome (217)

Références: C48: RSC 389 (25£) - RIC 293d (C) - BMC 194 - Hill 1587 (R) - BnF 6868; C23: RSC 390a (65£) - RIC 293f (S) - BMC 191 - Hill 1581 (R).

Caractéristiques: C48: Argent, 19mm, 3.2 g, 12h - Ex. Platt ; C23: Argent, 21mm, 4.88g, 12h. - Ex. CGB

Commentaire:

L'année 217, dernière année de règne de Caracalla, a vu un changement dans la continuité des types émis. Outre de nouveaux revers célébrant les victoires parthiques, les anciens types apparus avec les premiers antoniniens en 215 et maintenus en 216 sont prolongés en 217, mais avec de légères variantes: lion radié bondissant au lieu d'être passant, Sérapis tenant une couronne à la place de la main levée ou Jupiter tenant son foudre vers le haut au lieu du bas. Le Soleil avait un globe sur les premières émissions d'antoniniens. En 217, cet attribut est remplacé par le fouet de l'aurige, symbole de la conduite du char du soleil et signe d'invincibilité. Si vous êtes intéressés par ce type monétaire, je vous invite fortement à visiter l'excellent site de l'Helvien sur la figure du Soleil sur les monnaies romaines: http://soleilmonnaies.free.fr/mapage1/index.html

mardi 1 septembre 2009

Nobilitas: une personnification rare dans le monnayage romain - Denier de Géta (Rome, 199)

Cette personnification, rare dans le monnayage romain, apparait sous Commode et sera assez peu utilisée après l'emploi fait par les Sévères (Philippe I ou Tetricus II par exemple). Elle est en général utilisée pour les successeurs héréditaires au trône afin de souligner leur haute naissance. Ce denier entre donc parfaitement dans la politique de mise en place d'une nouvelle dynastie par Septime Sévère et dont le monnayage se fait l'écho (voir: SEVERI PII AVG FIL ou IMPERII FELICITAS)


n°G9

Dénomination: Denier

Empereur: Géta (César)

Avers: P SEPT GETA - CAES PONT - Buste, tête nue, drapé à droite.

Revers: NOBI-LITAS - La Noblesse debout à droite, tenant un sceptre de la main droite et le palladium de la gauche.

Atelier (année de frappe): Rome (199)

Références: RSC 90 (35£) - RIC 13a (S) - BMC SC223-7 - Hill 414 (C2)

Caractéristiques: Argent, 19mm, 3.22g, 11h. - Ex. HD Rauch

Commentaire:

Bien que le type soit explicité par la légende, les deux attributs portés par Nobilitas montrent par quel biais la Noblesse doit être acquise: la valeur au combat (la haste) et la sagesse dans le gouvernement (le Palladium en lien avec Minerve). Commode a utilisé le premier ce type et il semblait naturel pour lui puisqu'il descendait d'une illustre famille d'empereurs parmi les meilleurs que Rome ait connu. Pour Géta, il en est autrement, il est le fils d'un homme parvenu au pouvoir à la suite d'un coup d'état militaire, le véritable premier grand homme de la famille. Cette famille n'est pas de la plus haute noblesse, Sévère est provincial (africain), certainement de souche punique et est devenu membre de l'ordre sénatorial au cours de sa carrière, son père n'étant que chevalier. Il y a donc un certain décalage entre la réalité familiale et la propagande mettant en avant les fils de Septime Sévère.