dimanche 20 octobre 2013

La transition des styles à l'atelier de Laodicée et Cérès sur un denier de Septime Sévère

La huitième acclamation impériale est datée du début de l'été et est remplacée après le 19 février 197 par la neuvième. C'est durant ces quelques mois que le style de l'atelier de Laodicée évolue. En effet, on trouve des deniers portant la marque IMP VIII à la titulature de droit qui sont indéniablement du très caractéristique "nouveau style" et d'autres qui sont encore marqués par l'ancien style plus fruste, initié au moment de l'ouverture de l'atelier au début du règne. Le denier présenté ici relève encore de l'ancien style, mais il a déjà évolué par rapport aux premiers deniers des années 194-195 où seule la légende d'avers permet de distinguer les monnaies d'Emèse, de celles de Laodicée. Je rappelle que l'attribution de ces deux ateliers aux villes syriennes est purement conjecturelle. 
On remarquera également l'erreur du graveur dans la légende de revers, écrivant ERVGIF au lieu de FRVGIF. Ce type d'erreur, typique des premières émissions orientales, la lettre F n'existant pas dans l'alphabet grec, ne se produira plus durant la période du nouveau style. On peut penser que des graveurs latins ou du moins latinisés ont alors remplacé les graveurs de Laodicée du début du règne.


S134 

Dénomination: Denier

Empereur: Septime Sévère


Avers: L - SEPT SEV PE-RT AVG IMP VIII - Tête laurée à droite.


Revers: CERE-R ERVGIF - Cérès debout de face, tête à gauche, tenant deux épis de blé de la main droite et une longue torche de la gauche.


Atelier (année de frappe): Laodicée (196-197)


Références: RSC 68e (35£) - RIC 475note (S) - BMC W441 - BnF /


Caractéristiques: Argent, 17mm, 3.04g, 6h - Ex. fonds CGB


Commentaire:

Cérès orne aussi bien des monnaies romaines et orientales de Julia Domna que des deniers exclusivement syriens de Septime Sévère. Dans ce dernier cas, les deux ateliers d'Emèse et Laodicée ont tous deux livré des exemplaires où la déesse de l'agriculture, des moissons et de la fécondité apparaît toujours comme sur notre exemplaire debout portant des épis de blé et une longue torche. Elle partageait son temple quelque part du côté de l'Aventin avec Liber et Libera. On retrouve ainsi la triade d'Eleusis: Déméter, Dionysos et Perséphone. Il semble que le culte qui y était donné soit demeuré grec. On signalera également que le 29 mai, une fête religieuse, les ambervalia étaient données en l'honneur de la déesse. Quand on sait l'importance de la nourriture dans une ville aussi peuplée que Rome sous l'Antiquité où les famines n'étaient pas rares, il n'est pas étonnant que l'empereur se préoccupe des moissons et fasse représenter Cérès sur ses monnaies.
Sur ses statues, Cérès porte fréquemment, outre les épis de blé et la torche, des pavots, symboles du sommeil qu'opère la Nature durant les mois d'hiver lorsque sa fille Proserpine rejoint son mari Pluton aux Enfers.

  
Statue de Cérès portant des épis de blé, des pavots et une torche (Musée du Louvre, Paris)